Comprendre les systèmes de retraite en France

En France, le système de retraite repose sur trois grands piliers : le régime de base, le régime complémentaire et éventuellement l’épargne ou la retraite supplémentaire. Cependant, les modalités d’application diffèrent selon que l’on travaille dans le secteur public ou privé.

Le régime général des salariés du privé

Les salariés du privé dépendent du régime général, géré par la Caisse Nationale d’Assurance Vieillesse (CNAV). Ce régime fonctionne, comme ailleurs, sur un modèle de répartition : les cotisations des actifs financent directement les pensions des retraités actuels. Le montant de la pension de base est calculé selon une formule prenant en compte :

  • La durée d’assurance (le nombre de trimestres validés).
  • Le salaire annuel moyen, calculé sur les 25 meilleures années de la carrière.
  • Le taux de liquidation (plafonné à 50 % dans le régime général).

A cela, s’ajoute la retraite complémentaire obligatoire. Pour le privé, il s'agit du système de l'Agirc-Arrco, basé sur un fonctionnement par points. Les cotisations versées pendant la carrière sont transformées en points, chaque point ayant une valeur fixée par les gestionnaires du régime.

Les retraites des fonctionnaires

Pour les agents de la fonction publique, qu’ils soient titulaires ou assimilés, le système est légèrement différent. Ils ne cotisent pas au régime général, mais à des régimes spécifiques : le service des pensions civiles et militaires pour les fonctionnaires d’État, ou la CNRACL (Caisse Nationale de Retraites des Agents des Collectivités Locales) pour les agents territoriaux et hospitaliers.

Le calcul de la pension repose alors sur :

  • Le traitement indiciaire brut des 6 derniers mois de carrière.
  • Le nombre de trimestres de service validés.
  • Le taux de liquidation, là encore plafonné à 75 %.

Cette règle peut sembler plus avantageuse en raison de la prise en compte des six derniers mois - généralement les plus rémunérateurs - contre 25 années pour le privé. Mais cela concerne uniquement la rémunération indiciaire (hors primes), ce qui peut réduire l’avantage apparent pour de nombreux fonctionnaires.

Quelles différences majeures entre public et privé ?

Maintenant que les bases sont posées, faisons un comparatif précis des droits et des réalités pour les retraités des deux secteurs.

1. L’âge légal et les règles de décote

Que vous soyez du public ou du privé, l’âge légal de départ à la retraite est actuellement fixé à 62 ans (prochainement relevé à 64 ans avec la réforme en vigueur en 2027). Toutefois, les carrières longues, les métiers pénibles ou les cas particuliers (invalide, handicap, etc.) permettent parfois un départ anticipé.

Pour éviter une décote, les fonctionnaires et les salariés doivent totaliser un nombre minimum de trimestres, qui dépend de l’année de naissance. En cas de trimestres manquants, une pénalité dite « décote » est appliquée. Cependant, les règles de décote pour les agents publics diffèrent légèrement et peuvent être moins contraignantes, notamment pour les professions spécifiques comme les militaires ou les enseignants.

2. Les primes : un élément déterminant

Dans le privé, toutes les rémunérations (y compris salaires, primes, heures supplémentaires) sont prises en compte pour le calcul des droits à la retraite.

Dans le public, ce n’est pas le cas. Les primes, parfois conséquentes chez certains agents, ne rentrent pas dans le calcul de la pension issue du régime principal des fonctionnaires. Pour pallier cet inconvénient, un régime additionnel a été créé : la Retraite Additionnelle de la Fonction Publique (RAFP), qui fonctionne également par points. Néanmoins, les montants perçus via la RAFP sont souvent bien inférieurs aux compléments issus de l’Agirc-Arrco côté privé.

3. La réversion : plus ou moins avantageuse ?

Un autre chapitre clé à comparer concerne les pensions de réversion, versées au conjoint survivant après le décès d’un retraité. Dans les deux secteurs, les règles de réversion existent, mais les conditions diffèrent :

  • Dans le régime général, la réversion est accessible sous conditions de ressources, ce qui peut en exclure certains bénéficiaires potentiels.
  • Pour les fonctionnaires, les pensions de réversion sont versées sans condition de revenus à condition que le mariage ait duré un an au minimum avant le décès.

Les chiffres parlent d’eux-mêmes

À l’heure actuelle, la pension moyenne des retraités est, selon les dernières données de la DREES (Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques), de :

  • 1 503 euros brut mensuels pour un retraité du privé.
  • 2 228 euros brut mensuels pour un fonctionnaire.

Des différences marquées qui s’expliquent en partie par des parcours professionnels souvent plus stables dans le public, mais aussi par les modalités de calcul évoquées précédemment.

Vers une uniformisation ou une coexistence ?

Depuis plusieurs années, la question d’une plus grande harmonisation entre les régimes publics et privés revient régulièrement dans le débat public, notamment lors des réformes des retraites. La réforme systémique initialement proposée en 2020, qui visait un « système universel par points », devait gommer ces disparités. Mais les résistances, tout comme les spécificités des métiers, rendent cet objectif difficile à atteindre.

Finalement, le système actuel reflète une coexistence entre ces deux modèles. Et si les inégalités perçues sont régulièrement soulignées, elles restent souvent le fruit d’une méconnaissance des règles précises de chaque secteur.

Au-delà des chiffres : une question d’équité

Se pencher sur les droits des retraités dans le public et le privé, c’est finalement lever le voile sur une des facettes du modèle social français. Peut-on parler d’injustices flagrantes ou simplement de différences liées à des réalités professionnelles distinctes ?

Si l’objectif d’un système de retraite est de garantir une fin de vie digne à tous les travailleurs, quelle que soit leur carrière, le débat sur les équilibres entre ces deux univers reste légitime. Et, en tant que citoyens, il nous appartient de rester curieux, informés, et attentifs à ces enjeux qui, un jour ou l’autre, concernent chacun d’entre nous.

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