Avant de plonger dans le détail des formations, un rappel utile : l’expression « aînés » englobe une très large diversité de profils, de l’octogénaire découvrant pour la première fois une tablette, au jeune retraité déjà alerte mais démuni face à certaines démarches en ligne. Les besoins varient donc du simple « déblocage » sur l’usage d’une application, à des modules complets sur la sécurité ou la bureautique. Tour d’horizon des réponses apportées.
Selon les territoires, l’offre de formation varie, mais on retrouve trois grands formats.
Le réseau France Services déploie aujourd’hui plus de 2600 guichets en France (gouvernement.fr), avec une présence renforcée en zones rurales et quartiers prioritaires. Dans ces espaces, les aînés peuvent bénéficier de rendez-vous avec un Conseiller numérique France Services, dont la mission est l’accompagnement à l’usage des outils et services en ligne. Depuis 2021, plus de 8000 conseillers ont été formés, totalisant, selon le ministère de la Cohésion des territoires, plus de 2 millions de Français accompagnés tous publics confondus.
L’histoire commence dès les années 2000. Aujourd’hui encore, les Espaces publics numériques accueillent des seniors désireux de se former, via des dizaines de milliers d’ateliers. Par exemple, la ville de Nantes recense à elle seule plus de 20 sites reliés à ce dispositif local, tandis que la métropole de Lille en propose une dizaine pour les plus de 60 ans (epn-ressources.fr).
Certaines structures misent sur le lien intergénérationnel comme moteur d’apprentissage. C’est le cas de Unis-Cité avec ses programmes « Les Volontaires du Numérique » (plus de 2000 volontaires mobilisés par an) ou encore Silver Geek dont l’approche par le jeu rassemble lycéens et seniors autour de projets ludiques (tournois de Wii Bowling, initiation à la tablette tactiles, sessions smartphone…).
Les thématiques couvrent tous les besoins :
La durée des modules varie. Certains dispositifs proposent une initiation courte (2 à 3 séances) ; d’autres des parcours filés sur plusieurs mois (12 à 15 ateliers, évolutifs). Le coût, quant à lui, reste généralement très accessible, voire gratuit grâce à l’implication de bénévoles et de partenaires publics (État, collectivités locales, fondations privées).
Malgré l’offre, des obstacles persistent. Selon l’étude Défenseur des droits 2022 :
Les causes sont multiples : peur de mal faire, sentiment d’illégitimité, crainte de la panne, mémoire des arnaques vécues par des proches. Certaines personnes n’ont accès à aucun équipement individuel récent (ordinateur, tablette), ou manquent de connexion fiable à domicile : d’où l’importance des lieux physiques d’accueil.
Les établissements d’hébergement intègrent de plus en plus le numérique dans leurs programmes. Selon le Rapport CNSA 2023, 36% des Ehpad ont mis en place des ateliers réguliers (visioconférences avec proches, formations “photos partagées”, jeux interactifs, sécurité sur les réseaux sociaux). Certaines résidences font appel à des animateurs numériques dès l’accueil pour accompagner les nouveaux arrivants.
La crise sanitaire a poussé associations et collectivités à revoir leur copie. De nombreux ateliers sont désormais accessibles en visio ou sous forme de tutoriels guidés au téléphone, via des plateformes dédiées comme Solidarité Numérique ou le portail national “Pour les personnes âgées”. Un accompagnement qui a permis à des milliers de seniors isolés, parfois en zone blanche, de conserver un lien social tout en s’initiant à Internet. Le retour à des formats en présentiel n’a pas effacé cette tendance hybride, bien au contraire.
Si d’importants progrès ont été accomplis, plusieurs défis demeurent. Le renouvellement des équipements, le maintien d’une médiation humaine de proximité, la capacité à rendre les démarches administratives vraiment accessibles, ou encore l’inclusion des seniors en situation de handicap sont autant de pistes à investir, pointées par l’Observatoire des inégalités ou la Fondation France Répit.
À la croisée des générations, la formation au numérique des aînés est aussi une question de dignité, d’exercice de la citoyenneté, et de participation à la société. Et comme en radio, c’est souvent le contact direct, patient, bienveillant, qui fait toute la différence.