Assemblées citoyennes : une innovation démocratique

Les assemblées citoyennes ont pour vocation de compléter les mécanismes traditionnels de la démocratie représentative. Leur principe est simple : constituer un groupe d’habitants tirés au sort pour réfléchir à une problématique donnée et formuler des recommandations.

Ces assemblées se sont multipliées dans divers pays et à différentes échelles. En France, elles ont particulièrement fait parler d’elles avec la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC), lancée en 2019 par le gouvernement. Pendant plusieurs mois, 150 citoyen(ne)s tiré(e)s au sort se sont réunis pour proposer des mesures visant à réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le tirage au sort, censé garantir une représentativité démographique, a inclus des critères comme l’âge, le sexe, ou encore la région d’origine.

Cependant, des expériences similaires ont souvent révélé un problème récurrent : attirer et inclure des participants qui reflètent véritablement la diversité de la société, y compris en termes de générations.

Les seniors sous-représentés dans les assemblées citoyennes ?

Malgré les bonnes intentions du tirage au sort, la présence des personnes âgées dans ces dispositifs reste limitée. Mais pourquoi ? Voici quelques obstacles rencontrés :

  • L’auto-censure : Les seniors peuvent parfois se sentir "illégitimes" à apporter leur voix, notamment lorsque les débats portent sur des thématiques techniques ou complexes comme la transition écologique ou l’économie numérique.
  • Les contraintes pratiques : Participer à une assemblée citoyenne demande du temps et de l’énergie. Même si les interlocuteurs seniors retraités disposent davantage de temps, les déplacements ou les exigences des réunions peuvent parfois constituer des freins, surtout pour les personnes ayant des problèmes de santé ou des responsabilités familiales (petits-enfants, par exemple).
  • Le format des échanges : Les débats et la prise de parole dans ces assemblées nécessitent une aisance avec les outils numériques et les présentations publiques, ce qui peut intimider une partie des personnes âgées non familières avec ces pratiques.

Une étude menée par l’OCDE en 2020, portant sur les panels délibératifs dans plusieurs pays, montre que les catégories les plus âgées (70 ans et plus) ont souvent du mal à s’impliquer pleinement, même lorsque des quotas démographiques incluent des places pour eux.

L’intérêt des personnes âgées pour les assemblées citoyennes, pourtant bien réel

Pour autant, les seniors ne sont pas désintéressés par la participation citoyenne — loin de là ! Selon un rapport de France Stratégie publié en 2018, les Français de plus de 60 ans sont de plus en plus engagés sur le plan associatif et communautaire. Ils représentent 35 % des effectifs des bénévoles en France, une contribution importante.

Par ces engagements, les seniors montrent qu’ils ont des connaissances et des expériences précieuses à partager, en particulier sur des enjeux intergénérationnels comme le vieillissement de la population, la solidarité ou encore la transmission des savoirs. Cela démontre que leur participation aux assemblées citoyennes pourrait enrichir grandement les débats.

Les thématiques qui mobilisent particulièrement les seniors

Les personnes âgées sont souvent sensibles à certaines thématiques qui les concernent directement ou indirectement. Parmi elles, on trouve :

  • L’aménagement du territoire, avec une attention particulière au maintien des services publics de proximité (transports, médecine, commerces essentiels), notamment en milieu rural.
  • La santé et la sécurité sociale, deux sujets de préoccupation majeure avec le vieillissement de la population.
  • Les enjeux environnementaux, dans une perspective de préservation des générations futures.

Sur ces points, leur expérience et leur lucidité peuvent être de vrais atouts pour une intelligence collective.

Comment favoriser l’inclusion des seniors dans les processus délibératifs ?

Face à cette sous-représentation, il devient essentiel de créer des conditions favorables à une meilleure participation des personnes âgées dans les assemblées citoyennes. Voici quelques pistes à envisager :

  1. Adapter les formats de participation : Pour que les seniors participent pleinement, il faudrait envisager des formats hybrides alliant présentiel et distanciel, avec une prise en charge des déplacements et des équipements nécessaires.
  2. Former et accompagner : Certains seniors pourraient bénéficier d’un accompagnement pour mieux aborder les outils numériques utilisés dans ces instances ou pour préparer leurs interventions.
  3. Cibler la communication : Les appels à participation devraient davantage s’adresser aux seniors, avec des campagnes adaptées, par exemple via des relais dans les associations locales pour personnes âgées.
  4. Valoriser leur expérience : Redonner aux seniors le sentiment que leur vécu et leurs perspectives sont précieux pour l’ensemble de la population peut être un moteur puissant de motivation.

L’urgence d’une démocratie inclusive

Dans un monde vieillissant où les personnes âgées joueront un rôle de plus en plus prépondérant, leur place dans les mécanismes démocratiques comme les assemblées citoyennes est cruciale. Il ne s’agit pas seulement de corriger une sous-représentation statistique, mais bien de construire une véritable démocratie inclusive, où toutes les voix – jeunes comme âgées – trouvent leur place et leur écho.

En valorisant leur expertise et en levant les obstacles qui freinent leur participation, les assemblées citoyennes peuvent devenir des espaces où générations, savoirs et visions se croisent, pour inventer ensemble un avenir commun. Après tout, un débat riche et équilibré passe toujours par une réelle diversité des perspectives. Les seniors, loin des clichés qui entourent parfois leur âge, ont plus que jamais un rôle clé à jouer.

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